Communiqué de APA / Escola Pública et Bressola
Lors de la campagne présidentielle, François Hollande avait annoncé une mesure qui avait donné de l’espoir aux défenseurs de la langue catalane, c’était l’engagement 56 parmi les 60 engagements de François Hollande pour le changement. Cette proposition figurait dans le paragraphe «Je veux une république exemplaire et une France qui fasse entendre sa voix», sous-titre «Je veux donner un nouvel élan à notre démocratie». Elle était formulée simplement : «Je ferai ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires». Cet engagement avait également été confirmé après les élections présidentielles par le président Hollande, et par les membres du gouvernement.
La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires fut adoptée avec la convention européenne de 1992 sous les auspices duConseil de l’Europe (47 états membres actuellement). Contrairement à ce que l’on peut parfois lire, ce texte n’impose pas l’usage des langues régionales sur tous les actes et démarches de la vie publique, mais propose de mettre en oeuvre un ensemble de dispositions dont le but est de protéger et de favoriser les langues régionales et minoritaires en Europe. La France a signé cette charte le 7 mai 1999, elle s’est alors engagée à soumettre à la ratification 39 dispositions sur les 98 que comptent la Charte.
Cependant, depuis sa signature, la France n’a pas ratifié la Charte ; elle ne s’est donc pas engagée à appliquer ces dispositions. Parmi ces 39 dispositions, une partie d’entre elles sont déjà effectives en France, il s’agit donc d’officialiser cette situation, d’apporter une sécurité juridique aux langues régionales, de leur donner un statut et des droits. Il n’y a pas non plus à craindre des coûts supplémentaires exorbitants liés à cette ratification. Pour ce qui concerne l’enseignement, un enseignant bilingue ou immersif ne coûte pas plus cher qu’un enseignant monolingue. La France est régulièrement dénoncée par le Conseil de l’Europe et les Nations uniespour son manque de volonté à conférer aux langues régionales un cadre juridique protecteur.
Le gouvernement a présenté la réforme de la Constitution la semaine dernière : celle-ci ne comprend pas la ratification de la charte européenne des langues régionales. Malheureusement, il n’y aura pas d’autres occasions d’intégrer cette ratification dans une réforme de cette nature avant bien des années (et sans doute n’y en aura-t-il pas d’autre sous le quinquennat présent). Cela nous laisse interrogatif : François Hollande a-t-il abandonné l’idée de vouloir une république exemplaire ? Ne veut-il plus donner un nouvel élan à notre démocratie ? Le gouvernement a expliqué que le Conseil d’État a émis un avis négatif sur le projet de loi constitutionnelle concernant les langues régionales, et qu’il s’est retranché derrière cet avis.Cela signifie-t-il que la légitimité que les français ont accordée à François Hollande par le suffrage universel peut être remise en cause par des instances non élues ?
Le gouvernement a par ailleurs présenté un projet de loi de refondation de l’école.
Là encore, les langues régionales ont été largement oubliées : absentes dans la première version de ce projet, leur présence ne figure que à trois reprises dans l’annexe pour se contenter de choses qui existent déjà, aucune avancée nouvelle n’y figure malheureusement. Des propositions utiles avaient pourtant été faites par des députés, celles-ci n’ont pas été prises en compte. Où sont passées les ambitions que l’on espérait pour les langues régionales ?
Cette annonce du gouvernement tombe mal. Nos associations sentent un véritable engouement pour l’enseignement du catalan. Cet enseignement sort de l’anonymat, les citoyens sont demandeurs en ce qui concerne le catalan dans les domaines de l’enseignement mais aussi de l’audiovisuel, de la signalétique, et tout simplement en tant qu’élément essentiel de notre patrimoine. Mais la langue a besoin plus que jamais de sécurité juridique, et surtout d’une nouvelle impulsion qui doit être menée par les décideurs, qui se doivent d’accompagner cette demande citoyenne que l’on constate dans la société en Catalogne-Nord de sauvegarder et vivre notre langue au quotidien.